Le Chemin — Etoile de Coquelicot.

Aujourd'hui n'est qu'une pâle journée de belle saison. Il y a les belles journées et il y a celles comme aujourd'hui. Le ciel est grisonnant et une petite brume recouvre la combe de mon camp. Je me réveille seul dans ma litière, il est très tôt et le soleil n'est pas encore franchement levé. Je m'extirpe hors de mon nid et sort de la tanière. Je vais m'asseoir à proximité du tas de gibier, seul. Je ne prends pas de proie préférant la laisser aux chatons et aux reines. J'entreprends une rapide toilette pour démêler mon hirsute pelage. Comme à mon habitude lorsque je me réveille aux aurores je sors du camp afin d'être tranquille et passer du temps à réfléchir sur tout et rien.

Ma réflexion m'amène à la Marre aux Esprits. Cela tombe plutôt bien, je vais pouvoir me déshydrater. Mes pattes sont encore ankylosées de mon récent réveil. J'ai cauchemardé toute la nuit. Toujours le même : ma mère, devant moi me grondant sa déception à l'égard de ma promesse. Toujours le même réveil : haletant et encore plus fatigué que la veille. Je ne suis pas bien vieux – heureusement – cela me permet de tenir le rythme. Préférant le combat à la chasse, je n'ai pas vraiment envie de m'emmerder à chasser pour le groupe, j'enverrai une patrouille.

Une seule chose m'effraie dans ma vie : devenir comme mon père et c'est ce qu'il est entrain de se passer bien que ce ne soit pas de ma faute. Ma sœur m'a jeté, mon frère m'ignore à longueur de journée alors qu'eux deux se voient et sont complices. Je n'aurai peut être pas dû les protéger comme j'ai pu le faire lorsqu'ils étaient jeunes. Ces longues pensées m'ont fait baisser mon attention et un bruissement me fait sortir de celles-ci. Je fais volte-face, les oreilles en arrière, méfiant de qui pouvait se cacher derrière ce buisson :

Le vent se faufilait entre les parois de la tanière d’Étoile de Coquelicot. Couchée dans son antre, la jeune cheffe observait d'un œil attentif l’extérieur de la caverne. La visibilité était compromise du fait qu'il reposait sur le camp une fine brume grisâtre. Bientôt la combe serait remplie de guerriers travaillant d’arrache-pied pour maintenir en ordre le Clan. Elle se releva et huma plus attentivement l'air : de la pluie était à prévoir. La féline se releva en faisant craquer son dos puis sorti de l'antre du chef à pas de loups pour ne pas attirer l'attention. Personne ne semblait réveillé, elle en déduit donc qu'il était tôt. Il était compliqué de déterminer l'heure à cause du ciel couvert. Les quelques fougères qui osaient s'aventurer dans le camp étaient recouvertes de gouttes d'eau, probablement dût à l'humidité. La pile de gibier était haute, asses pour ne pas s'en préoccuper. Elle s'arrêta devant la sortie du camp, jeta un dernier regard pour vérifier que personne ne l'avait vue et s'aventura en dehors du camp. Un petit instant seule, loin de ses responsabilités ne lui ferait pas de mal.

La féline arriva au niveau de la mare aux esprits, elle huma l'air de la forêt : de la végétation, une douce odeur d'eau fraîche, quelques proies mais le plus important fut l'odeur d'un chat de son clan.
Sans vraiment attendre de savoir qui était le mystérieux matou la cheffe se précipita vers la direction indiquée par son subconscient. Ses pas s’accélérèrent jusqu'à ce que Coquelicot se retrouva à courir, ses pas ralentirent quand elle détermina qu'elle était asses proche. La demoiselle s'aventura dans quelques buissons provocants des frémissements de la part de ceux-ci. Apparemment le bruit avait affûté les sens du guerrier n'étant personne d'autre que Sombre Loup.
Il se retourna brusquement les oreilles abaissées. C'était le moment parfait pour sortir des arbustes dans lesquels Étoile de Coquelicot était cachée.

« Ce n'est que moi, elle dévoila petit à petit son corps, se débarrassant par la même occasion des quelques bouts de feuillage coincé dans son pelage, eh bien je ne m'attendais pas à te voir ici, Sombre Loup. Comment vas-tu aujourd'hui ? »

Étoile de Coquelicot. J'aurai dû m'en douter. J'ai sous estimé notre meneuse, pensant qu'elle ne remarquerai pas mon absence. Après tout, elle est peut être uniquement là par pur hasard et s'est retrouvée face à moi, se rendant compte que je ne faisais strictement rien pour aider le clan.


Elle – comme on pourrait dire – un peu de mal à ôter les épines et les feuilles coincées dans son épaisse fourrure. Une esquisse de sourire se dessine sur mon visage en la voyant avoir quelques complications avec certaines épines. Je ne bronche pas et me contente de répondre d'un ton sarcastique :


L'air se glisse entre mes crocs laissant un sifflement m'échapper. Je tourne autour de notre meneuse, l'analysant du bout de ses griffes à ses moustaches en passant par ses hanches. Je ne serai pas vous dire si je l'apprécie ou si je la déteste. Je ne pense pas qu'on puisse parler d'amitié mais ni d'inimitié.


Une simple provocation avec des vagues dans la voix pour tester les limites de ma chef. Cela faisait que quelques lunes que j'étais lieutenant et celle-ci risquait de regretter son choix. J'allais lui en faire voir de toutes les couleurs.